Vérinage de grande hauteur sur VIPP

Bonjour à tous,

Nous avons pour projet la réparation d’un pont VIPP de première génération dont les appareils d’appui et les cachetages de protection des câbles aux abouts sont fortement détériorés. Le tablier en question est situé en travée centrale et il est encadré par 2 travées d’accès en BA.

Pour les appareils d’appuis les bossages de vérinage et le frettage associé sont prévus pour leurs remplacements.

Pour les réparations des cachetages des câbles, les poutres étant très proches du mur garde-grève, il parait compliqué de les réparer correctement. Puisque nous vérinerons l’ouvrage pour le remplacement des appareils d’appuis, nous souhaiterions étudier la possibilité de vériner le pont sur la totalité de sa hauteur de manière à réparer les cachetages en vis-à-vis à partir de la plateforme routière (la solution de la démolition du mur garde grève n’etant pas possible du fait de présence de travées d’accès).

Je recherche des références de travaux similaires avec des vérinages de grandes hauteurs sur VIPP : cela s’est-il déjà fait ?

Merci par avance de votre retour.

Cordialement.

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Christophe RAULET le 28/03/2024 à 08:44

Bonjour,
Il me semble que la question du "pourquoi réparer les cachetages ?" est essentielle. S'il s'agit d'assurer l'efficacité de la précontrainte dans les poutres en fiabilisant l'ancrage, il y a peut être des systèles "palliatifs" évitant le vérinage toute hauteur des poutres ? Un diagnostic de l'état de la précontrainte a-t-il été fait ? Car se préoccuper des cachetages/ancrages n'est peut-être pas suffisant ?

Il semble par ailleurs qu'un trés faible vérinage, voire vérinage "à 0", soit possible/suffisant en ce qui concerne les AA.

Bien cordialement,

Ch.RAULET 

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Xavier HERVAIS le 28/03/2024 à 10:45

Bonjour,

Merci pour votre réponse.

Effectivement pour les AA un vérinage de décompression à « zéro » permet de chasser les AA et de les remplacer à l’identique si les bossages sont bons.

Pour la précontrainte les investigations sont en cours de programmation.

Pour la réparation des cachetages garants de la protection des ancrages vis-à-vis de la corrosion et des entrées d’eaux dans les gaines une réparation s’impose. Pour accéder à ces cachetages, il faut passer sous des entretoises massives qui sont proches du sommier d’appui (20cm non suffisant pour passer).

Un vérinage a minima de 40 à 50 cm pour pouvoir amener des moyens humains et matériel semble déjà inévitable. Dans cette configuration la place disponible (10cm) entre le mur garde grève et l’extrémité de la poutre ne permet pas de faire une réparation de qualité et durable.

De plus, les camarteaux vont également gêner et empêcher les accès aux abouts. Cette configuration ne semble pas idéale, d’où ma question. Quitte à avoir vériné sur 50 cm, pourquoi ne pas aller un peu plus haut pour faire apparaitre les ancrages au-dessus de la chaussée (mise en place de contreventements, vérinage par LAO etc…).

Si des références de travaux de cet ordre ont déjà été faits, je suis preneur.

Cordialement.

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Renaud LEGLISE le 29/03/2024 à 09:32

Bonjour Xavier,

Si la réfection des cachetages d'about est impérative comme tu l'indiques, il est possible à mon avis de procéder au vérinage de grande hauteur tel que tu le suggères. Pour faire ces travaux de réfection des cachetages, il ne semble pas y avoir bcp d'alternatives eu égard aux contraintes géométriques que tu décris...

Le vérinage d'un VIPP, qui est un ouvrage très raide, demande des précautions et des tolérances très strictes sur les dénivellations différentielles, tout particulièrement sur la même file d'appui. Le fait de vériner sur une grande hauteur nécessite de maîtriser toutes les opérations sur un nombre de phases potentiellement important, ce qui complexifie forcément.

Peut-être une piste à explorer : le hissage, plutôt que le vérinage ? Je suis tombé sur une vidéo qui peut donner des idées ? https://www.youtube.com/watch?v=-qff1GVVONw

Une étude de faisabilité s'impose à mon avis.

Une suggestion pour la future réparation des cachetages d'about une fois bien dégagés et accessibles : couler un BFUP pour leur reconstitution.

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Farid KHITER le 29/03/2024 à 10:47

bonjour,
le vérinage de grande hauteur est à mon sens pas compliqué, mais impose des précautions et des tolérances sévères surtout pour un vipp.
La configuration et les dispositions des vérins sont des points à étudier, vérinage sous entretoise d'about ou vérinage sous poutres.
Beaucoup d'ouvrages sont construits à plusieurs mètres de leur niveau définitif du coup monter ou descendre.
Visiblement tu considères que l'ouvrage est vérinable, du coup les études, les calculs et diagnostic sont ok .
J'attire aussi ton attention sur les tolérances de dénivellation transversale elles sont très faibles en règle générale, cela dit le LAO s'impose.
J’imagine aussi que cet ouvrage fait l’objet d’une réparation d’ensemble, du coup si une réfection du dessus est aussi envisagée (enrobé, étanchéité, renformis), prévoir le vérinage avec le moins de charges possibles.
Comme le dit Renaud, une étude comprenant un recalcul doit être menée au préalable, avec les tensions résiduelles les précontraintes longitudinales et transversales (poutres, entretoise, hourdis), attention au dévers longitudinal pour le vérinage.
Le retour d’expérience connu pour le dévérinage concerne des ouvrages neufs dévérinés sur une hauteur de plus de 2 mètres, par LOA et une équipe des Pays Bas, durée du dévérinage 3 nuits.
Vu aussi sur un vipp, un vérinage double, sur poutre en principale et sur entretroise en complément.
Farid 

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Christophe RAULET le 29/03/2024 à 11:08

Ne pas oublier non plus le contrôle extérieur de vérinage avec un double asservissements aux verins, en plus de la centrale de LAO à imposer en effet. Les procédures doivent être bien calées avec le contrôle extérieur et le MOE pour prévenir tout problème. Attention à la limite de représentativité des calculs compte tenu des hypothèses, notamment sur la précontrainte. Les tolérances longitudinales et transversales doivent restées faibles dans tous les cas, mais surtout maitrisées.

Bien cdlt,
Ch.Raulet 

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Renaud LEGLISE le 29/03/2024 à 11:43

Il va de soi que la LAO, que citait déjà Xavier, est impérative. Tolérances transversales d'à peine qqs dixièmes de millimètres.

Sinon, un collègue m'a informé que la Communauté Européenne d'Alsace (le CD68 en l'occurrence, avant) avait une expérience des vérinages de grande hauteur et que deux membres de notre communauté pourraient nous faire part de leurs préconisations et Rex.

Gabriel AUBERT (CeA)

Matthieu KIRSTETTER (Cerema, agence Strasbourg)

@Gabriel, Matthieu : merci d'avance si vous pouvez contribuer ! je ne dénoncerai pas la personne qui vous a recommandés 😁 (mais vous avez sûrement deviné !)

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Matthieu KIRSTETTER le 23/05/2024 à 14:15

Bonjour,

La CeA (collectivité Européenne d'Alsace) a vériné un VIPP sur une heuteur d'environ 1,20 m pour le renforcement par collage de tissus en matériau composite en about des poutres et remplacer les appareils d'appui. L'utilisation d'une centrale de vérinage LAO est indispensable. Le vérinage doit être piloter en déplacement.

La course des vérins est limitée (quelques centimètres à quelque dizaine de centimètres, en fonction du type de vérin utilisé et de la hauteur disponible entre le sommier et la sous-face des poutres). Un vérinage de grande hauteur nécessitera plusieurs paliers de vérinage avec repose du tablier sur un calage provisoire afin de rehausser le calage sous vérin.

Une fois les appareils d'appui déposés, lorsque la place est suffisante un 2e vérin peut être posé à la place de l'appareil d'appui. Cela permet de vériner alternativement depuis le vérin posé sur le bossage de vérinage et depuis le vérin qui remplace l'AA, avec à chaque palier, rehausse du calage  alternativement sur le bossage de vérinage et au niveau de l'appui.

Les tolérances de vérinages exigées sont en général de quelques dixièmes de mm, mais en réalité ces tolérances ne sont clairement pas tenables sur un vérinage de grande hauteur :

- La précision des capteurs de déplacement est au mieux de l'ordre du 10e de mm. Plus le capteur est long, moins il sera précis (sur une grande course, la précision est proche du mm).

- La repose de l'ouvrage sur un calage lors des différents paliers de vérinage sera forécement à l'origine de dénivellations entre points d'appui d'une même ligne dus au tassement du calage.

- En fonction de la course des capteurs de déplacement utilisés, le vérinage nécessitera une reprise des capteurs de déplacement. Ce n'est pas un problème. La centrale LAO doit permettre de figer les altimétrie lors de la dépose / repose du capteur.

- La verticalité des capteurs de déplacement (en général, à fils). Lors du démarrage du vérinage, le capteur de déplacement est rentré et il est difficile de contrôler la verticalité. Dans les faits, la verticalité est réglée à l'oeil. Sur une grande hauteur un léger défaut de verticalité induira des erreurs.

Pour réaliser les travaux dans de bonnes conditions, il faudrait :

- Que les dénivellations maximales admissibles entre appuis soient évaluées par un bureau d'études.

- Que les pressions et descentes maximales admissibles dans chaque vérin ou groupe de vérins soient calculées et figurent dans la procédure d'exécution.

- Que l'entreprise équipe l'ouvrage d'un dispositif de contrôle des altimétries externe à la chaine de mesure (réglets par exemple) : 1 par voie de vérinage, càd 1 par capteur de déplacement). Cela permettra de contrôler la position du tablier en cas de défaillance d'un capteur. (lecture millimétrique, mais ça peut être très utile !)

Le suivi des opérations de vérinage/dévérinage par le contrôle extérieur est fortement conseillé. Un suivi topo des dénivellations du tablier avec un niveau de précision ou un tachéomètre permet de contrôler les altimétries aux différents paliers de reprises de vérins.

Le vérinage d'un VIPP sur une grande hauteur est réalisable, mais les travaux doivent être menés avec soin et rigueur dans la mise en place des calages, dans l'installation des capteurs de déplacement afin de minimiser les dénivellations entre points d'appui. L'opérateur de vérinage doit être méticuleux dans la prise en charge du tablier et durant toute la durée du vérinage.

Le dévérinage ne doit pas être négligé et doit être réalisé avec le même soin que le vérinage. L'opération est un peu plus sensiblepuisque le piston des vérins est rentré sous l'effet du poids de l'ouvrage et la descente du tablier est conditionnée par l'ouverture et la fermeture des électrovannes de la pompe hydraulique, dont l'ouverture est réglée manuellement par l'opérateur de vérinage.

Sur un vérinage de grande hauteur une tolérance de vérinage de l'ordre du 10e de mm n'est pas réaliste. On se situe plutôt dans l'ordre de grandeur du mm. Il est donc important d'appréhender la dénivellation maximale entre appuis que pourra tolérer la structure.

Je reste à votre disposition pour tout renseignement complémentaire éventuel.

Bien cordialement,

Matthieu

5 votes :

Renaud LEGLISE
le 23/05/2024 à 17:17

Un très grand merci Matthieu pour ces recommandations aussi nombreuses que précises !

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Xavier HERVAIS
le 24/05/2024 à 09:08

Merci pour toutes ces recommandations techniques très précises et ce retour d'expérience.

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Xavier HERVAIS le 24/05/2024 à 09:28

Bonjour,

Un grand merci à tous pour vos réponses qui enrichissent le sujet et qui répondent à nos interrogations.

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Frédéric Rambault le 27/05/2024 à 09:27

Bonjour,

En fonction de la configration du site et du diagnostic, vous pourrez aussi comparer à une opération de démolition / reconstruction du garde greve (c'est en particulier pertinent si celui ci subit aussi une corrosion). Techniquement c'est un peu moins sensible et ca permet de reconstruire le garde greve un peu plus loin pour faciliter les inspections et l'entretien ultérieur. Il pourra aussi etre opportun de rajouter un système de récupération des eaux sous joints pour limiter les venues d'eau. 

Cordialement,

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